Montréal, le 15 mai 2019

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Communiqué : Le CTI-IWC, le MAC de Montréal et l’Association des juristes progressistes saluent une victoire historique dans les tribunaux pour le droit à l’assurance-emploi des travailleurs migrants

Le 10 mai 2019, la Cour canadienne de l’impôt a rendu une décision historique qui reconnaît que les travailleurs migrants temporaires peuvent être admissibles aux prestations d’assurance-emploi malgré le fait qu’ils travaillaient sans permis de travail valide.

Accompagnés par le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants – Immigrants workers center, un groupe d’une quinzaine de travailleurs agricoles d’origine guatémaltèques ont porté en appel une décision de l’Agence du revenu du Canada refusant de reconnaître que leur emploi était assurable au sens de la Loi sur l’assurance-emploi. Ces travailleurs, recrutés dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires, pouvaient seulement travailler pour un seul employeur, vu leur permis de travail “fermé”.  Or, ils ont été victimes d’un stratagème frauduleux mis en place par des entreprises québécoises qui les ont recrutés en prétendant qu’ils pouvaient travailler pour un autre employeur que celui qui les avait recrutés initialement.

L’Agence du revenu du Canada considérait que les heures travaillées n’étaient pas assurables, car le permis de travail des travailleurs ne leur permettaient pas d’être à l’emploi de ces entreprises. Jusqu’à présent, l’Agence du revenu du Canada a systématiquement comme pratique d’exclure un nombre substantiel de travailleurs migrants qui se retrouvent en situation de chômage sous prétexte que leur emploi n’était pas couvert par un permis de travail. Ceci est d’autant plus déplorable que cette exclusion vient exacerber leur état de vulnérabilité.  

Dans ce jugement sans précédent, la Cour a conclu qu’un emploi peut être assurable en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi même si les heures travaillées étaient le fruit d’un emploi exercé sans qu’un permis de travail ne l’autorise. Dans un jugement-phare de 48 pages, elle statue que la pratique de l’Agence du revenu du Canada n’est pas conforme à la Loi. Elle considère que l’interdiction de travailler sans permis valide n’a pas nécessairement pour effet d’exclure les travailleurs puisqu’il est essentiel de leur assurer l’accessibilité aux régimes publics de protection sociale. De ce fait, la Cour considère que l’intérêt public commande de reconnaître la contribution majeure des travailleurs migrants à l’économie canadienne et qu’il est inacceptable de les exclure systématiquement.

La Cour rappelle notamment que l’obligation d’avoir un permis de travail a pour origine historique le fait de prioriser l’accès au travail aux citoyens canadiens. Or, dans son analyse, la Cour juge que dans le contexte contemporain, “il est évident voire notoire que les milliers de travailleurs agricoles étrangers ne constituent ni une menace ni une entrave aux droits des travailleurs canadiens”.

Ainsi, le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants, le Mouvement Action-Chômage de Montréal et l’Association des juristes progressistes souhaitent saisir cette occasion afin de souligner cette avancée majeure pour le droit des travailleurs migrants temporaires.

Madame Viviana Medina, organisatrice du Centre des travailleurs et travailleuses immigrants, déclare: “Cette décision historique rend justice non seulement à ce groupe de travailleurs mais aussi à des milliers de travailleuses et travailleurs temporaires qui se voient systématiquement refuser leur droit à la protection sociale et leurs droits du travail. Nous espérons également que cette décision d’une cour fédérale obligera le Ministère de la Sécurité publique à reconnaître que l’interdiction territoriale sans possibilité de retour imposée à ce groupe de travailleurs pour avoir travaillé sans permis valide n’a pas lieu d’être, est ridicule et est inacceptable”.

Monsieur Jérémie Dhavernas, organisateur du Mouvement Action-Chômage de Montréal, déclare : “Il est tout de même incroyable d’être obligé de se rendre jusqu’à la Cour canadienne de l’impôt pour établir un droit qui devrait aller de soi! En matière de chômage, c’est depuis 1990 que l’État canadien broie systématiquement les droits des travailleuses et travailleurs en matière d’assurance-chômage, migrant.e.s ou non. Cette victoire nous ravie et elle permettra peut-être, avec d’autres luttes, de diminuer les abus dont sont encore victimes des travailleuses et travailleurs migrant.e.s ”

Me Richard-Alexandre Laniel, procureur des travailleurs et administrateur de l’Association des juristes progressistes, déclare : “Tous les travailleurs et travailleuses, peu importe leur statut migratoire et leur origine nationale, doivent avoir droit aux régimes étatiques de protection sociale. Ce jugement est d’autant plus important qu’il renverse un courant jurisprudentiel qui excluait systématiquement les travailleurs migrants temporaires sans permis valide du bénéfice des prestations d’assurance-emploi.”

Les personnes ci-dessus et un membre du groupe ayant participé à la contestation judiciaire sont disponibles pour des entrevues.

Contact pour entrevues :

-Me Richard-Alexandre Laniel, Association des juristes progressistes : 514 690 2988

-Mme Viviana Medina, Centre des travailleurs et travailleuses immigrants  : 514 342 2111

-M. Jérémie Dhavernas, Mouvement Action-Chômage de Montréal : 514 271-4800